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si la parfaite ignorance fait la parfaite imbécillité, l’homme d’esprit ne paroît quelquefois manquer de mémoire que parcequ’on donne trop peu d’étendue à ce mot de mémoire, qu’on en restreint la signification au seul souvenir des noms, des dates, des lieux et des personnes, pour lesquels les gens d’esprit sont sans curiosité, et se trouvent souvent sans mémoire. Mais, en comprenant dans la signification de ce mot le souvenir ou des idées, ou des images, ou des raisonnements, aucun d’eux n’en est privé : d’où il résulte qu’il n’est point d’esprit sans mémoire.

Cette observation faite, il faut savoir quelle étendue de mémoire suppose le grand esprit. Choisissons pour exemple deux hommes illustres dans des genres différents, tels que Locke et Milton ; examinons si la grandeur de