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« Comme il voltige autour d’une rose nouvelle,
« Se balance dans l’air, suspendu sur son aile,
« Contemple quelque temps sa forme et ses couleurs,
« Et vole sur son sein pour ravir ses faveurs.
« Ainsi, lorsque l’aurore, éclairant l’hémisphere,
« Vient rendre à la beauté le don heureux de plaire,
« Ce papillon c’est moi ; la rose c’est Doris.
« Admirant de son sein l’incarnat et les lis,
« Mon avide regard contemple avec ivresse
« Son beau corps arrondi des mains de la Mollesse.
« Ne puis-je du desir modérer les fureurs ?
« Je vole entre ses bras, et ravis ses faveurs.
« Dans l’excès du plaisir nos ames semblent croître,
« S’unir, se pénétrer, et ne former qu’un être.
« Mourons et renaissons sur l’autel des amours. »
Peux-tu, dis-je. ô Sagesse, écouter ce discours ?
Des fausses voluptés tel seroit le langage.
Non, ce n’est point ici la demeure du sage ;
Et le remords toujours mêle dans notre sein
Au nectar du plaisir le poison du chagrin.
L’Ennui, qui dans tous lieux poursuit le Sybarite,
N’entre point, reprit-elle, au séjour que j’habite ;
Et, quand la jouissance attiédit ses desirs,
Le sage en d’autres lieux cherche d’autres plaisirs.