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rence qui semble immobile et qui glisse sans bruit, soit par le désir qui court ; nul ne sait dans quel précipice il pouvait être conduit, et conduit, sachez-le bien, par le désir de monter. La passion déréglée des hauteurs peuple les abîmes ! car elle enfante la folie. Ô sagesse éternelle, dirigez nos pas tremblants ! Nul ne sait à quel point il a besoin de vous…

L’état d’Hoffmann, qui suppose peu de foi mais beaucoup de crédulité, semblerait exclure l’ironie. Il en est tout autrement. Hoffmann est sardonique jusque dans la folie. Son ironie, comparée à celle de Voltaire, produit un contraste intéressant. L’ironie de Voltaire se moque de toute intervention surnaturelle : elle nie à la fois l’influence divine et l’influence infernale ; elle détache les faits des idées ; elle isole la terre et prêche d’un air idiot l’absence éternelle de Dieu. Elle ne nous dit pas que nous manquons notre fin, elle nous dit que nous n’avons pas de but, que rien n’est ordonné par rapport à aucun terme, qu’aucune influence, ni bonne ni mauvaise, n’existe nulle part. Elle nous fournit pour arme, pour pain et pour lumière, un ricanement stupide lancé à la face de tout et de tous

Voilà ce superbe dix-huitième siècle, comme quelqu’un l’a appelé, M. Mignet. Il faut que ces mots-là soient notés. Pourquoi priver nos neveux du fou rire qui les attend ?

L’ironie d’Hoffmann n’insulte pas les profondeurs et les mystères qui dominent la vie humaine. Elle porte sur l’homme et non pas