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et dont ils ne voudraient pas parler : ce serait le sentiment de leur défaite prochaine, et si ce sentiment muet était obligé de pousser un cri, il crierait : Voilà mon vainqueur. Cette attitude de la médiocrité en face du génie est un des spectacles les plus tristes que la terre puisse offrir.

La réputation se fonde sur des assises connues ; ses progrès sont appréciables. Elle avance prudemment et calcule tous ses pas ; puis, quand elle a bien calculé, elle s’aperçoit qu’elle a mal calculé. Elle manque presque toujours le but qu’elle visait, et aboutit souvent, dans sa vieillesse, à une obscurité qui est une punition.

La gloire naît dans une obscurité d’une autre espèce, l’obscurité de l’initiation ; elle en sort comme elle est y est entrée, sans savoir pourquoi. Puis elle grandit toujours et atteint le but sans l’avoir visé.

Dans la vie et la marche de la réputation, tout est calcul.

Dans la vie et la marche de la gloire, tout est mystère.

La gloire mène les siens à gauche quand elle veut qu’ils arrivent à droite.

Les hommes médiocres qui se sont fait une réputation proposent toujours, pour régler les affaires de ce monde, des arrangements d’une apparente clarté, qui ressemblent au bon sens des hommes inférieurs, limpides, accessibles à toutes les intelligences, faciles à saisir, présentant au premier coup d’œil la