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grise, semble jeter sur toutes choses un manteau gris. Les hommes se ressemblent beaucoup en apparence. Le costume établit une dissemblance artificielle, l’usage en établit une autre, la timidité en établit une autre, la dissimulation en établit une autre, l’ignorance en établit une autre : on vit sur des apparences.

Une multitude innombrable de voiles cache les réalités. Les hommes ne disent pas leurs secrets, ils gardent leur uniforme.

L’homme qui verrait de sa fenêtre une rue très populeuse serait épouvanté, s’il réfléchissait aux réalités magnifiques ou affreuses qui passent devant lui, sans dire leur nom, déguisées, couvertes, dissimulées profondément, semblables les unes aux autres, si l’apparence est seule consultée. Mais son épouvante augmenterait, si ce spectateur intelligent d’une foule qui ne parle pas se disait : Ma vie dépend peut-être d’un des hommes qui passent ici, sous mes yeux : peut-être un homme que j’attends, peut-être un homme qui m’attend est là, devant ma porte. Mais il y a beaucoup d’hommes devant ma porte : si celui dont je parle se trouve ici, à quel signe le reconnaître ?

L’histoire de la vérité et l’histoire de l’erreur sont remplies toutes deux de rencontres, et d’événements qui semblent fortuits.

Le spectacle des choses qu’il faut deviner et qu’on ne devine pas a conduit l’antiquité sur