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Il a pour auxiliaires en ce monde l’esprit juste et l’esprit simple.

L’esprit juste, apercevant certains rapports vrais, respecte et admire celui qui, dans la même direction, en aperçoit d’autres, plus cachés, plus lointains. L’esprit simple respecte, admire et aime l’homme de génie, parce que le génie n’est que la plus haute forme de la simplicité humaine. La simplicité se regarde dans le génie comme dans un miroir fidèle, mais grandissant son objet. Les choses ordinaires grandissent, quand le génie les touche : les paroles du génie expriment plus qu’elles ne disent. Le génie, comme la foudre, entr’ouvre l’horizon.

L’homme de génie a pour adversaire l’homme de talent, pour ennemi l’homme d’esprit, pour ennemi mortel l’homme médiocre.

L’homme de talent le nie, l’homme d’esprit se moque de lui, l’homme médiocre essaye de le dédaigner, puisqu’il ne peut l’anéantir.

L’homme de talent, satisfait de ce qu’il a, ne veut pas de ce riche qui pourtant se trouve pauvre, et qui, donnant plus que qui que ce soit, trouve encore qu’il ne donne rien. Il ne croit pas qu’il y ait quelque part une sphère supérieure à la petite sphère où il se tient, où il se plaît, où il s’amuse, où il amuse les autres.

L’homme d’esprit rit, parce que, ne croyant qu’aux surfaces, il a pitié du fou qui veut les percer. Quand Christophe Colomb monte sur son navire, il rit, parce qu’il n’a pas l’habi-