Les sentiments que j’appelle inconscients et parmi lesquels l’Envie accepte une place éminente, doivent peut-être aussi leur inconscience à leur profondeur et à leur tranquillité apparente. Les passions qu’on avoue, ou plutôt qu’on étale, font du bruit, et l’homme aime le bruit.
Les passions qui peuvent conduire soit au trône, soit à l’échafaud, ont des retentissements extérieurs et publics qui flattent le triomphateur, si triomphe il y a, qui flattent la victime, si le coup n’a pas réussi.
Les passions qui sont ou qui veulent être les excès d’une grande nature, avide d’expansion, d’amour ou de vengeance, se traduisent par des actes extérieurs. Par là il leur est impossible d’échapper aux regards de celui qui les éprouve ou de ceux qui les contemplent. Ici l’homme est forcé de s’avouer son acte intérieur, dont l’acte extérieur fait foi. Il veut bien aussi l’avouer aux autres, parce que son acte extérieur révèle une force interne et appelle la publicité. La publicité ! voilà le mot de tout en ce siècle ! voilà le secret ! La publicité est le grand désir de l’homme moderne ! Erostrate a devancé ses contemporains quand il a brûlé un temple, et Alcibiade quand il a coupé la queue de son chien ! Il est vrai qu’Athènes était déjà Paris. Quoi qu’il en soit, la publicité, qui est le contraire de la confession sacramentelle, la remplace pour l’homme moderne. On dirait qu’à ses yeux la publicité efface les fautes qu’elle livre à la