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lâtrie par la nouvelle. Il pense en panthéiste, il aime en panthéiste, il vit en panthéiste.

Que fait René ? que fait Obermann ! Ils adorent les souffles qui passent dans l’air, les arbres, les plantes, les couchers de soleil, les lueurs vagues, visibles on invisibles qu’ils aperçoivent ou croient apercevoir dans l’horizon désert qui les emprisonne. Désespérant d’aimer quelqu’un, déshabitués d’aimer Dieu, ils tâchent d’aimer toutes les choses réelles ou imaginaires et de distraire leur cœur par une promenade incessante. Toutes ces peines sont perdues. Ni l’intelligence ni l’âme humaine ne peuvent étouffer les réclamations de l’unité invincible : nul panthéisme ne satisfait, et tout panthéisme appelle le suicide. Pour aimer tous les êtres sans désespoir, le seul moyen c’est d’aimer l’Être lui-même. En lui l’ardeur d’aimer s’apaise et s’enflamme à la fois. Loin de lui, l’ardeur d’aimer s’exalte dans le vide, se dissipe, se dévore, retombe sur elle-même et se détruit.