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Il est beau que Régane dise :

« Je me sens mal, très mal. »

Et que Gonérille réponde à part :

« Si tu ne l’étais pas, je ne me fierais plus jamais au poison. »

Mais Cordélia meurt et le drame est perdu !

Cordélia meurt, et cette passion du désespoir, qui est la délectation de l’enfer, apparaît telle qu’elle est, et Shakspeare, après avoir montré ce qu’il pouvait être, a montré ce qu’il est. Il est resté l’homme des ténèbres. Le Roi Lear n’est qu’un magnifique accident. Ce n’est pas une conversion. Et cet accident déclare avant de finir qu’il ne modifie en rien l’essence de l’homme. C’était une lueur et non une lumière, c’était un transport et non un dégagement. L’homme des ténèbres reste fidèle aux ténèbres.

Et, cependant, que l’occasion était belle, puisqu’il s’agissait de châtier l’ingratitude ; que l’occasion était belle pour entrer dans le monde d’en haut et pour entr’ouvrir, d’une main tremblante, les sanctuaires où sont cachés les trésors de la Justice !

Il est superbe d’interroger, relativement à l’ingratitude, la tradition catholique.

En général, à propos du péché, elle parle d’abord et surtout de miséricorde. Mais, à propos de l’ingratitude, il est beau de voir à quel point la justice revient souvent, et de quelle façon et dans quels termes.

Après l’institution de l’Eucharistie, après avoir reçu la communion, Judas se leva de