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lui est pas même permis d’y songer. Le repentir peut chanter, mais non pas le remords ! Entre le repentir et le remords, la distance est infinie, car le repentir espère et le remords n’espère pas. Le repentir croit au pardon ; le remords croit à la perte irréparable, et chacun d’eux est entraîne dans la direction qu’il choisit. Celui qui, au lieu de se livrer au repentir, se livre au remords, refuse le pardon à un homme, et cet homme, c’est lui-même. Celui qui refuse un pardon demandé semble livrer son prochain au remords, et celui qui pardonne le livre au repentir.

L’antiquité est avide de remords ; c’est pourquoi elle chantait peu. Le repentir est une mélodie qui célèbre la gloire de Dieu sous la figure de la miséricorde.

Si Hamlet et la reine sont voués au silence, est-ce Ophélia qui chantera ? Encore moins, s’il est possible. Il ne lui reste pas ce qu’il faut de pureté pour produire une harmonie. Ophélia est froide comme la folie et corrompue comme la tristesse. Si Hamlet était le type du jeune homme. Ophélia serait le type de la jeune fille ; mais c’est le contraire qui est vrai. Le cœur héroïque et le cœur virginal sont ignorés du monde d’en bas ; dans ce drame ténébreux, l’homme est mollasse, et la femme flétrie.

Shakspeare a du goût pour le désespoir et du goût pour l’obscénité : le désespoir est son travail, l’obscénité son repos. Il se délasse dans l’obscénité qui remplit ses petites scènes,