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liette passent en ce bas monde pour le type de la passion humaine. Il y a même, dans le nom de ce petit bonhomme et de cette petite pensionnaire très mal élevée, quelque chose qui ressemble à de la magie. Comment sont-ils parvenus à cette immense réputation d’ardeur ? Comment ont-ils conquis pour leur flamme cette universelle renommée ? Par quel enchantement le bavardage de ce gamin a-t-il prestige et auréole ? Ce qui le caractérise le plus expressément, c’est la froideur. Ce collégien amoureux de Rosaline devient amoureux de Juliette, et rien ne change que le nom de l’idole. Ce dernier mot est à sa place ici. Il n’y a rien, dans cette passion, pas un sentiment, pas une pensée, pas un lien sérieux, pas une profondeur, pas une harmonie. Ce sont deux fantaisies qui jouent ensemble dans une langue plate, obscure, froide et alambiquée. Si, pour être ardent, il suffisait d’être absurde, leur passion serait ardente. Mais c’est le contraire qui arrive. Rien n’est froid comme la folie. Pas un mot ne sort de leurs lèvres qui vienne du fond de l’âme. C’est un rhétoricien et une rhétoricienne qui échangent quelques raisonnements sophistiques et quelques froides métaphores, apprises par cœur dans un mauvais livre. Ils tiennent tout entiers en deux mots : fadeur et froideur.

Pour établir la vérité de cette règle générale, il faut indiquer les exceptions qu’elle rencontre et appuyer sur celles-ci. Il y a quelques mots frappants. La scène du rossignol et