des esprits, souvent le lendemain matin la main pâle du mort essaie d’en griffonner la description.
Je les vis rire, je les vis sourire, puis je les vis tomber dans l’abîme. J’entendis leurs sanglots, leurs râles d’agonie, et j’assistai à tout cela sans être troublé.
Vêtu de deuil, je suivis leur convoi funèbre et l’accompagnai jusqu’au cimetière ; ensuite, je ne le cacherai pas, je dînai de bon appétit.
Aujourd’hui cependant, voici que tout à coup je pense avec tristesse à tout ce cortége d’amies mortes depuis si longtemps. Un amour subitement allumé agite d’étranges flammes dans mon cœur !
Ce sont surtout les larmes de la petite Juliette qui me reviennent en mémoire. Le doux regret devient un désir fougueux, et jour et nuit je l’appelle !
Souvent la fleur morte s’offre à moi dans les songes de ma fièvre ; alors je reprends courage comme si elle donnait un aliment posthume au feu de mon amour.
Ô gracieux fantôme, enveloppe-moi de tes bras. Plus ferme, plus ferme encore ! presse ta bouche sur ma bouche ; adoucis l’amertume de la dernière heure.