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plus pure. Je ne suis qu’une guenille, moi ; je ne suis que matière ; vaine fusée, il faut que je m’évanouisse et que je redevienne ce que j’ai été, — un peu de cendre. Adieu donc, et console-toi. Peut-être d’ailleurs s’amuse-t-on dans le ciel beaucoup plus que tu ne penses. Si tu rencontres la grande ourse dans la voûte des astres, salue-la mille fois de ma part.


IV
LES PANTOUFLES ROUGES

La méchante chatte, si vieille et si grise ! elle disait qu’elle était cordonnière. Il y avait devant sa fenêtre un petit étalage de pantoufles pour les jeunes filles, petites pantoufles de maroquin, de satin, de velours, ornées de garnitures d’or et de rubans à mille fleurs. La plus jolie de toutes, c’était une paire de pantoufles d’un rouge écarlate ; au merveilleux éclat de ses reflets, mainte fille, en passant, avait la joie au cœur.

Une jeune et blanche souris de bonne maison passait devant l’étalage de la cordonnière. Elle revient sur ses pas et s’arrête, elle regarde par la fenêtre et dit enfin : « Salut, madame la chatte ! Vous avez de bien jolies petites pantoufles rouges. Si elles ne coûtent pas trop cher, je les achète ; dites-moi votre prix. »