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d’un valet j’exécute le jugement que tu rends, — fût-il même injuste.

À Rome, dans les anciens jours, on portait une hache devant le consul. Toi aussi, tu as ton licteur, mais c’est derrière toi qu’il marche.

Je suis ton licteur et je te suis sans cesse avec la hache impitoyable ; je frappe, et ce que ton cerveau a enfanté, s’accomplit. Tu es la pensée ; moi, je suis le fait.


7

Je rentrai chez moi et dormis comme si les anges m’avaient bercé. On repose si moelleusement dans les lits d’Allemagne : car ce sont des lits de plume.

Combien de fois n’ai-je pas regretté la douceur du duvet natal, quand je me couchais sur de durs matelas dans les nuits sans sommeil de l’exil !

On dort très-bien et on rêve encore mieux dans nos lits de plume. C’est là que l’âme allemande se sent libre de toute chaîne terrestre.

Elle se sent libre et plane dans les espaces les plus reculés du ciel. Âme allemande, esprit émancipé, que ton essor est audacieux dans tes rêves nocturnes  !

Les dieux pâlissent à ton approche, et sur ton chemin que d’étoiles n’as-tu pas époussetées du souffle de tes ailes !