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caractère un peu raide et opiniâtre ; si le roi lui-même me regardait en face, il ne me ferait pas baisser les yeux.

Pourtant, mère chérie, je le dirai hautement : malgré l’orgueil puissant dont se gonfle mon âme, en ta bienheureuse et douce et confiante présence, une crainte souvent s’empare de mon cœur.

Est-ce ton esprit qui doucement me subjugue, ton haut esprit qui pénétra vaillamment toute chose et monter étincelant, vers la lumière du ciel ?

Ou bien est-ce le remords d’avoir commis tant de fautes qui t’ont contristé le cœur, ce cœur si beau et qui m’a tant aimé ?


2

Dans mon aveuglement je t’ai quittée un jour ; je voulais pousser jusqu’au bout du monde, pour voir si je ne rencontrerais l’Amour, que j’eusse amoureusement pressé dans mes bras.

J’ai cherché l’Amour sur toutes les routes, j’ai tendu la main à toutes les portes, mendiant une pauvre aumône d’amour, — mais on ne m’a donné, en riant, que la haine froide.

Et toujours, et toujours, j’errais après l’amour, mais je ne l’ai trouvé nulle part, et je suis revenu au logis, malade et triste.

Mais là, tu es venue au devant de moi : ah ! ce que j’ai vu luire en tes yeux, c’était le doux Amour depuis longtemps cherché.


À M. STR.
après avoir lu son étude sur le vieil art allemand

Comme, avec empressement, j’ouvrais ton petit livre, beaucoup d’images connues vinrent me saluer, des images d’or que j’avais vues autrefois, dans mes rêves de jeune homme et dans mes jours d’enfant.

Je le revois, s’élevant hardiment vers le ciel, le pieux dôme qu’a construit la foi allemande ; j’entends les voix des cloches