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Les jeunes filles se murmurent à l’oreille. « En voici un qui sort du tombeau. » Hélas ! non, aimables jeunes filles, il n’en sort pas, il y va, au tombeau.

Il a perdu sa bien-aimée, et la tombe est la meilleure place où il puisse reposer et dormir jusqu’au jugement dernier.


5
LIED DU PRISONNIER


Quand ma grand-mère[1] eût ensorcelé la Lise, les gens voulurent la brûler. Déjà le bailli avait barbouillé maint grimoire, mais elle ne voulait pas avouer.

Et quand on la jeta dans la chaudière, elle cria à l’assassin ! Et quand monta la fumée noire, elle s’envola comme un corbeau.

Ma petite grand-mère au plumage noir, oh ! viens me voir dans ma tour ! Viens, vole vite à travers les grilles et apporte-moi fromage et gâteau.

Ma petite grand’mère au plumage noir, oh ! puisses-tu empêcher seulement, que demain, quand je me balancerai en l’air, ma tante à coups de bec ne m’arrache les yeux !


6
LES DEUX GRENADIERS[2]


Vers la France s’acheminaient deux grenadiers de la garde ; ils avaient été longtemps retenus captifs en Russie. Et lorsqu’il arrivèrent dans nos contrées d’Allemagne, ils baissèrent douloureusement la tête.

Ici, ils venaient d’apprendre que la France avait succombé, que la vaillante et grande armée était taillée en pièces, et que lui, l’Empereur, l’Empereur était prisonnier.

  1. Il s’agit de la sorcière.
  2. Écrit en 1816.