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C’est ainsi que tomba mon noble héros. C’est ainsi qu’il périt ; mais, après sa mort, il ressuscitera immortel dans les chants du poète.

Il ressuscitera immortel dans mes vers, et sa gloire parcourra la terre sur des trochées pathétiques de quatre pieds.

Un jour, le roi de Bavière lui élèvera une statue dans le panthéon Walhalla, avec cette inscription dans le style lapidaire de sa manière wittelsbachienne :

« Atta Troll, ours sans-culotte, égalitaire sauvage. Époux estimable, esprit sérieux, âme religieuse, haïssant la frivolité.

« Dansant mal cependant ! portant la vertu dans sa velue poitrine. Quelquefois aussi ayant pué. Pas de talent, mais un caractère. »


25

Trente-trois vieilles femmes, coiffées du capuce rouge des anciens Basques, attendaient à l’entrée du village.

Une d’entre elles, comme Débora, jouait du tambourin en dansant, et chantait une hymne à la louange de Lascaro, le tueur d’ours.

Quatre hommes vigoureux portaient en triomphe l’ours mort. On l’avait assis tout droit sur une chaise, ainsi qu’un baigneur malade.

Derrière, comme s’ils étaient les parents du défunt, suivaient Lascaro et Uraka. — La sorcière saluait à droite et à gauche, mais non sans un grand trouble.

L’adjoint du maire tint un discours devant l’hôtel de ville, lorsque la procession fut arrivée là. Il parla de mainte et mainte chose.

Par exemple, de l’état florissant de la marine française, de la presse, de la question des betteraves et de l’hydre renaissante de l’anarchie.

Après avoir énuméré abondamment les mérites de Louis-Philippe, il passa à l’ours et au grand exploit de Lascaro.