Muets d’admiration, le museau attentif, les oursons contemplent leur père qui danse gravement au clair de lune.
Atta Troll est mélancoliquement étendu sur le dos, dans sa caverne, au milieu des siens ; il lèche ses pattes en rêvant, il lèche et murmure :
— Mumma ! Mumma ! perle noire que j’avais pêchée dans l’océan de la vie, je t’ai donc reperdue à jamais dans ce même océan ?
Ne dois-je jamais te revoir qu’au delà de la tombe, à l’heure où, dégagée de tes dépouilles mortelles, tu ne seras qu’une âme sans peau ?
Ah ! je voudrais auparavant baiser une dernière fois le gracieux museau de ma chère Mumma ; il était si doux et comme parfumé de miel !
Mais, hélas ! Mumma languit dans les chaînes de cette engeance qui s’appelle l’homme et qui s’imagine être le propriétaire de toute la terre.
Mort et damnation ! ces hommes, ces archi-aristocrates, regardent toutes les autres créatures avec l’insolence du seigneur et maître !
Ils nous enlèvent femmes et enfants, nous enchaînent, nous battent, nous tuent même pour vendre notre peau et notre graisse ;
Et ils se croient permis ces forfaits, surtout contre la race des ours, et ils appellent cela les droits de l’homme.
Les droits de l’homme ! les droits de l’homme ! et qui vous les a octroyés ? Ce n’est pas la nature, elle n’est pas dénaturée à ce point.