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Je vais bientôt partir encore, puis de nouveau je reviendrai. Alors vous n’aurez plus ni chaleur ni froideur ; je poserai le pied sur votre tombe, et mon cœur sera devenu pauvre et vieux.


70

Me voici loin des belles lèvres, et des beaux bras qui m’enlaçaient si fort ! Je ne demandais qu’à rester un jour encore, mais le postillon apparut avec ses chevaux.

Telle est la vie, enfant ! Une éternelle plainte, un éternel adieu, un éternel départ ! Ton cœur ne pouvait-il se cramponner au mien ? Tes yeux eux-mêmes n’ont-ils donc pu me retenir ?


71

Toute la nuit nous avons roulé seuls dans l’obscure voiture de poste. Nous avons reposé cœur contre cœur ; nous avons plaisanté et ri.

Mais quand parut le petit jour, enfant, nous fûmes bien étonnés. Entre nous deux était assis l’amour, voyageur aveugle.


72

Dieu sait où la folle donzelle s’est installée ; maugréant, sous la pluie qui tombe, je bats toute la ville.

J’ai couru d’un hôtel à l’autre et me suis adressé en vain à tous ces rustres de garçons.

Soudain je la reconnais à une fenêtre ; elle me fait signe et rit d’un rire clair. Pouvais-je deviner, ma belle, que tu t’étais logée dans un hôtel aussi princier !


73

Comme des rêves enténébrés, les maisons se suivent par longues files. Enfoncé dans un manteau, je passe devant, en silence.