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Il racle et danse en sautillant, et ses os font un cliquetis ; il salue du crâne et salue encore, sinistre dans le clair de lune.


25

Plongé dans de sombres rêveries, je regardais son portrait d’un œil fixe, quand le visage bien-aimé se mit à vivre doucement.

Sur ses lèvres se jouait un ravissant sourire et dans ses yeux perlaient des larmes de chagrin.

Moi aussi, des larmes m’inondèrent les joues… Hélas ! je ne puis pas croire que tu sois perdue pour moi !


26

Atlas misérable que je suis ! C’est un monde, le monde entier de la douleur qu’il me faut porter ; je supporte l’insupportable et mon cœur va se briser en moi.

Cœur orgueilleux, c’est toi qui l’as voulu ! Tu voulais être heureux, infiniment heureux ou infiniment misérable, cœur orgueilleux, et te voilà aujourd’hui misérable.


27

Les années viennent et s’en vont, les générations descendent dans la tombe, mais jamais ne passe l’amour que je porte dedans mon cœur.

Je voudrais te voir une seule fois encore, tomber à genoux devant toi, et te dire en succombant : « Madame, je vous aime ! »


28

Je rêvais ; la lune avait un triste regard, les étoiles avaient l’air triste ; mon rêve m’emporta vers la ville où demeure ma bien-aimée, à des centaines de lieues.

Il me conduisit chez elle ; je baisai les marches du perron que souvent son petit pied foule et qu’effleure la traîne de sa robe.