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de la conception musicale.

muette, sans conscience, et la réflexion, le retour sur soi, sur ses pensées intérieures et déterminées, entre l’action et la contemplation. L’oiseau a aussi, dans son chant, cette jouissance de lui-même.

Cependant la simple expression naturelle des interjections n’est encore nullement la musique. Ces exclamations, à la vérité, ne sont nullement des signes artificiels comme ceux du langage articulé ou de la parole ; mais aussi elles n’expriment pas une pensée conçue dans sa généralité. Elles manifestent avec le son et dans le son même une situation morale, un sentiment qui s’exhale avec les cris, et soulage le cœur par la secousse et l’ébranlement imprimés à l’organisation. Mais cette délivrance de l’âme n’a rien de commun avec celle que produit l’art. La musique doit exprimer les sentiments par des sons mesurés et cadencés, enlever ainsi à l’expression naturelle sa violence, l’adoucir et la tempérer.

Ainsi les interjections forment bien le point de départ de la musique ; cependant elle ne commence à être un art que comme interjection cadencée. Sous ce rapport, elle doit façonner artistiquement ses matériaux à un plus haut degré que la peinture et la poésie, pour que ceux-ci soient capables d’exprimer le sentiment d’une manière conforme à l’art. Nous aurons à examiner, par la suite, comment les sons doivent être façonnés pour répondre à ce but. ici je me borne à une remarque déjà faite : les sons en eux-mêmes et dans leur ensemble offrent la plus grande diversité ; ils peuvent se séparer