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son développement historique.

naïveté, leur piété ; il y a plus, elles surpassent en général, les meilleures des Italiens par la profondeur du sentiment religieux ; mais les maîtres flamands n’ont pu s’élever à une égale beauté de la forme et de la liberté de l’ame. Leurs Enfants-Jésus, en particulier, sont mal faits. Quand aux caractères d’hommes et de femmes, bien que, dans dans le cercle de l’expression religieuse, ils manifestent aussi les qualités de la vie mondaine sanctifiées par une foi profonde, cependant, en dehors de cette piété ou plutôt au-dessous d’elle, ils paraissent plutôt insignifiants, et, en quelque sorte, incapables d’être en soi libres, pleins d’imagination et d’intelligence.

Un second côté, qui mérite de fixer l’attention, c’est la manière dont on passe de la piété calme et absorbée dans la vénération des choses saintes à la représentation des martyrs et à la laideur de la réalité, en général. C’est ici que se distinguent particulièrement les maîtres Hauts-Allemands, lorsqu’ils font ressortir dans le cours de la vie et de la mort du Christ, dans les scènes de la Passion, la cruauté des bourreaux et des soldats, la grossièreté de leurs insultes, la barbarie qui éclate dans leur haine contre le Sauveur, et qu’ils caractérisent, avec une grande énergie, les traits odieux et difformes qui trahissent au dehors la perversité du cœur. L’effet calme et beau que produit la piété est refoulé, dans l’agitation que commandent ces sortes de situations. On passe alors aux tiraillements affreux, aux gestes de la barbarie, à l’expression de la fréné-