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fond romantique de la peinture.

nous les regarderions avec un intérêt tout différent. Nous voudrions savoir quels sont ces gens-là, ce qu’ils font, pour quel motif ils voyagent, etc. Le peintre, au contraire, saisit à la dérobée les mouvements les plus rapides, l’expression la plus fugitive du visage, les apparences de couleur les plus instantanées dans cette mobilité ; il met tout cela devant nos yeux, simplement dans l’intérêt de cette vitalité de l’apparence qui, sans lui, disparaîtrait sans retour. C’est en particulier le jeu de l’apparence colorée, et non la couleur comme telle, c’est le clair obscur, le relief ou le retrait des objets qui font que la représentation paraît naturelle. Ordinairement, dans les ouvrages d’art, nous faisons moins attention qu’il ne mérite à ce côté que l’art seul nous révèle. En outre, l’artiste, sous ces rapports, emprunte à la nature l’avantage qu’elle a d’entrer jusque dans les plus petits détails. Comme elle, il est concret, déterminé, individualisé, puisqu’il conserve à ces objets la même individualité que possède l’apparence vivante dans ses éclairs les plus rapides. Et, toutefois, les particularités immédiates ne sont pas servilement reproduites, simplement pour les sens ; il offre à l’imagination un caractère fini et déterminé, dans lequel perce encore la généralité.

Maintenant, plus sont insignifiants, comparés aux sujets religieux, les objets que représente ce genre de peinture, plus, précisément, la production artistique, la manière de les voir, de les saisir, de les