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n’est autre chose que la pensée pure, la pensée dans sa plus haute expression, dans sa forme universelle, nécessaire et absolue. La pensée de la nature est donc ce qu’il y a de plus élevé dans la nature, c’est sa fin suprême ; ou, pour parler avec plus de précision, la pensée, par cela même qu’elle est la fin de la nature, n’appartient plus à la nature, mais elle s’élève au-dessus d’elle et la dépasse, et c’est parce qu’elle la dépasse, qu’elle peut la penser et la connaître, et la connaître à chacun de ses degrés et dans ses divers aspects, dans ses différences et dans son unité. De fait, les divers points de vue que nous venons d’indiquer, qu’on les considère séparément ou dans leurs rapports, supposent la science, et ils trouvent dans la science leur dernière justification et leur plus haute existence. Ainsi, si nous examinons l’utile, nous verrons d’abord qu’il suppose la science de l’utile, car dans la nature l’utile et le nuisible sont non-seulement juxtaposés, mais combinés dans un seul et même être. « Dans la tendre enveloppe de cette petite fleur, dit frère Laurent, le poison trouve sa demeure, et la médecine sa vertu[1]. » Ce n’est là d’ailleurs qu’un exemple de la vie générale de la nature où le mouvement amène la vie et la mort, le feu vivifie et brûle, où, en un mot, la même force, le même agent, semblable à la lance d’Achille, blesse et guérit. Ensuite, en entrant plus avant dans la science de l’utile, on voit paraître une autre science qui n’est plus la science de l’utile, mais qui détermine l’utile, et qui

  1. « Within the infant rind of this small flower
    Poison hath residence and medicine power »

    (Roméo et Juliette)