Page:Hegel - La Poétique, t. 1, trad. Bénard, 1855.djvu/84

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
6
de la poésie en général.

phiquement démontré, dans la liaison logique de leurs éléments, mais comme vivifiant, animant, et gouvernant l’ensemble. Ils sont exprimés de telle sorte, que l’unité qui embrasse le tout, l’âme proprement dite qui le vivifie, agisse seulement d’une manière cachée et du dedans au dehors.

Ce mode de conception, ainsi que la forme et l’expression qu’il entraîne, conservent dans la poésie un caractère purement contemplatif. Ce n’est pas la chose en elle même et son existence pratique, mais l’image et le discours, qui est le but de la poésie. Celle-ci a commencé lorsque l’homme entreprit de s’exprimer lui-même. Ce qui est exprimé ainsi est là pour être uniquement exprimé. Si l’homme, au fort de l’action et du danger, s’élève jusqu’à se recueillir et se contempler lui-même, et qu’il veuille exprimer sa pensée, alors s’échappe de sa bouche une expression poétique, un écho de la poésie. Ainsi, pour ne citer qu’un trait, nous en trouvons un exemple dans le distique, conservé par Hérodote, qui retrace la mort des Grecs tombés aux Thermopyles. La pensée est d’une parfaite simplicité. Il est dit que quatre mille Péloponésiens ont combattu contre trois cent mille Perses. Mais l’intérêt consiste à façonner une inscription, à exprimer le fait pour les contemporains et pour la postérité ; c’est le récit pour le récit, et dès lors l’expression est poétique, c’est-à-dire quelle se révèle comme une création (ποιεῖν) de l’esprit, qui laisse le fond dans sa simplicité et cependant façonne l’expression à dessein. Le mot qui renferme la