Page:Hearn - Au Japon spectral, 1929.pdf/267

Cette page a été validée par deux contributeurs.

temps ailleurs, et les brisants grandissaient toujours. Leurs mouvements me fascinaient. Combien indiciblement complexe est un pareil mouvement, et cependant combien éternellement jeune. Qui saurait le décrire parfaitement pendant seulement cinq minutes ? Aucun mortel n’a jamais vu deux vagues se briser absolument de la même façon. Et sans doute nul mortel n’a jamais contemplé la houle de l’Océan, ni entendu son tonnerre, sans se sentir devenir très grave. J’ai remarqué que les animaux eux-mêmes, — les chevaux et les vaches, — deviennent méditatifs en présence de la mer, ils demeurent immobiles, à regarder et à écouter, comme si la vue et le bruit de cette immensité leur faisait oublier tout le reste du monde.

Il y a un dicton populaire sur cette côte, qui dit : « La mer a une âme, et elle entend ». Voici comment s’explique le sens de cette phrase : ne parlez jamais de votre crainte, lorsque vous avez peur sur mer ; si vous avouez que vous avez peur, les vagues s’élèveront tout à coup plus haut.