Page:Hearn - Au Japon spectral, 1929.pdf/260

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Mais lorsque je me rendis à la plage à dix heures, tout était fini, et tout le monde était rentré chez soi. Au-dessus de l’eau je vis quelque chose qui ressemblait à une longue nuée de lucioles ; c’était les lanternes qui flottaient en une lente procession vers la haute mer. Elles étaient déjà si éloignées qu’on ne distinguait que des points enflammés de couleurs différentes ; j’étais très déçu, je sentais que j’avais, par ma paresse, manqué une occasion qui ne se reproduirait jamais, car toutes ces vieilles coutumes du Bon disparaissent rapidement. Tout à coup je me dis qu’il serait facile de rejoindre les lumières à la nage. Elles flottaient très lentement. Alors je laissai tomber ma robe sur la plage, et je plongeai dans l’eau. La mer était calme, et merveilleusement phosphorescente. Chaque brasse enflammait une traînée de feu jaune. Je nageai vite, et rejoignis la dernière barque de la flottille des lanternes bien plus tôt que je ne le croyais. J’eus l’impression qu’il serait malséant de déranger les petites embarcations, ou de les faire dévier de leur cours