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un de ces villages désertés que nous apercevons parfois le long des routes ; l’herbe a envahi le seuil des portes ; les murs se lézardent, les toits s’affaissent ; et la tour de l’église, la haute tour qui dominait autrefois les campagnes et attirait de loin tous les regards, s’est écroulée.

Certes, on a soutenu qu’à défaut de conquêtes nouvelles, la langue française, dans de telles conditions, pourrait garder longtemps encore les territoires acquis. Lorsque les légions romaines quittèrent la Gaule devant le flot des barbares, le latin ne cessa pas d’être employé ; mais Rome n’était plus. Ainsi le français pourrait conserver une force de rayonnement. Mais nous ne voulons pas de cette gloire posthume ; vivre, et non pas survivre seulement ! C’est déjà trop, que d’oser séparer le sort de la langue française de celui de la France. Nous les associons, indissolublement, et nous croyons à leur commune vitalité. Nous avons foi dans l’avenir de la patrie, parce qu’elle a toujours trouvé, aux moments difficiles de son histoire, des ressources qui l’ont sauvée ; parce qu’elle vient d’infliger aux pessimistes, qui dans une circonstance récente allaient