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« Allons, Antée, remue-toi donc, vieux paresseux ! Vois-tu là-bas un autre géant, aussi fort que toi, qui vient pour te combattre ?

— Niaiseries que tout cela ! grogna Antée encore engourdi. Vienne qui voudra, je veux finir mon somme tranquillement. »

Cependant l’étranger avançait toujours, et les Pygmées purent immédiatement remarquer que, si la taille était moins élevée que celle de leur frère, il avait les épaules bien plus larges. Et quelles épaules ce devaient être !… je vous l’ai dit du reste autrefois, elles avaient soutenu le poids du ciel. Les Pygmées, dix fois plus alertes que leur lourdaud de frère, impatientés de sa fainéantise, résolurent de le faire mettre sur pied. Ils commencèrent à pousser de violentes clameurs, et allèrent même jusqu’à le piquer avec leurs épées.

« Debout ! debout ! lève-toi, vilain nonchalant ! le géant étranger a un bâton encore plus gros que le tien ; ses épaules sont plus larges que les tiennes ; et, à notre avis, il est le plus fort de vous deux. »

Ces derniers mots firent sortir Antée de son apathie. Il ressentit plus profondément cette offense que la pointe de leurs armes ; et, s’étant mis sur son séant, en proie à la mauvaise humeur, il exécuta un bâillement de plusieurs mètres de large, se frotta l’œil, et enfin tourna sa tête stupide dans la direction que lui indiquaient avec tant d’empressement ses petits amis.