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nouveau, plongé dans une sorte d’extase. Quel beau spectacle ! Étincelant de sa propre clarté, il était là, ce trophée d’un prix inestimable, que tant de héros avaient aspiré à contempler. Mais les infortunés ne comptent dans la mémoire des hommes que comme des victimes d’une ambition démesurée, tombées au milieu du voyage, ou sous le souffle embrasé des taureaux d’airain.

« Quelle majesté ! quelle splendeur ! s’écria Jason transporté d’enthousiasme. C’est sans doute un rayon ravi de la lumière céleste. Laissez-moi m’approcher et me charger d’un butin si glorieux.

— Arrête ! dit sa compagne en le retenant. As-tu donc oublié que ce trésor a son gardien ? »

Le fait est que, transporté de bonheur et près de voir ses désirs exaucés, le héros ne songeait plus au terrible dragon. Bientôt cependant une circonstance vint lui rappeler quels dangers le menaçaient de nouveau. Une antilope, trompée sans doute par cette apparition, et la prenant pour le lever du soleil, vint à passer en bondissant à travers le bois. Elle s’élança comme un trait vers le foyer lumineux. Au même instant un sifflement effroyable fendit les airs. Le dragon déroule du tronc d’arbre autour duquel il était replié ses anneaux couverts d’écaillés, allonge une tête immense, et l’antilope disparait en un clin d’œil dans ses horribles mâchoires.