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raissaient se fondre en flots grondants et se lancer avec furie pour engloutir celui qui leur résistait avec un courage si énergique. Quand il fut parvenu au milieu du courant, un des troncs déracinés dont je vous ai déjà parlé se détacha des rochers contre lesquels il était retenu, et se précipita contre lui avec ses branches dressées comme les cent bras du géant Briaré. Heureusement la violence du tourbillon l’emporta un peu plus loin. Un moment après, le pied du généreux jeune homme se trouva pris entre deux rochers, et y resta si étroitement serré, que, dans son effort désespéré pour l’en retirer, il perdit l’une de ses sandales à courroies d’or.

Cet accident lui arracha involontairement un cri d’impatience.

« Qu’y a-t-il, mon ami ? demanda la vieille.

— Il y a que je viens de perdre une de mes sandales. Et quelle figure vais-je faire à la cour du roi Pélias, avec une chaussure à courroie d’or à un pied, et rien à l’autre ?

— Ne t’en chagrine pas. La fortune ne t’a jamais mieux servi qu’en te dépouillant de cette sandale. Je suis heureuse d’apprendre que tu es précisément la personne dont le chêne parlant a fait mention. »

Le jeune homme avait bien le temps alors de demander ce qu’avait dit le chêne parlant ! Mais la vivacité avec laquelle sa compagne avait prononcé