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Cette tendre mère, je ne veux jamais en perdre la mémoire.

— Nous verrons, fit l’inflexible interlocuteur. Vous ne savez pas quelle heureuse vie nous mènerons ici. Tenez, nous voici déjà près du portique. Voyez ces colonnes, je vous assure que celles-là sont bien d’or massif. »

Il mit pied à terre, et, enlevant Proserpine dans ses bras, franchit les nombreux degrés du perron qui donnait accès au large vestibule du palais. L’intérieur était illuminé au moyen d’énormes pierres précieuses, de différentes nuances, qui scintillaient comme autant de lampes, mais avec cent fois plus de splendeur, et faisaient ressortir la magnificence de l’appartement. Malgré cet éblouissant coup d’œil, il régnait dans ces lieux une tristesse indéfinissable. Il n’y avait pas un seul objet sur lequel la vue se reposât agréablement, excepté pourtant la petite étrangère elle-même et une fleur qu’elle n’avait pas laissée tomber de sa main avec les autres. Dans mon opinion, le roi Pluton n’avait jamais connu le bonheur sous les voûtes de son palais, et c’était pour cette raison qu’il avait enlevé Proserpine : il voulait avoir près de lui un être sur lequel il pût porter son affection, et qui chassât l’ennui, cet éternel compagnon de sa souveraine puissance. Bien qu’il prétendît détester la lumière du monde supérieur, la jeune fille, malgré son dés-