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rois, disait celui-ci. Oh ! sentez-vous ce fumet délicieux ? Je vous le garantis et je le répète, on n’offrirait rien de mieux à vingt-deux têtes couronnées.

— Je désire, ajoutait son voisin, qu’on nous serve principalement de bons morceaux substantiels, des aloyaux, des côtes de choix, des gigots, et le moins possible de bagatelles et de friandises. Si je pensais que cette excellente dame ne le prît pas mal, je demanderais volontiers pour commencer une tranche de jambon bien grasse, frite dans la poêle. »

Oh, les gourmands ! les gloutons ! Voyez jusqu’où allait leur voracité. Ils étaient là, étendus sur des sièges princiers, que dis-je, sur des trônes, occupés uniquement de leur grossier appétit. Il est vrai que leur nature participait de celle des loups et des porcs. Aussi ressemblaient-ils beaucoup plus à ces vils animaux qu’à des rois, si toutefois, entre nous, les rois sont ce qu’ils devraient être.

La reine de ces lieux frappe dans ses mains : aussitôt entrent vingt-deux serviteurs apportant les mets les plus succulents, tout brûlants encore du feu des fourneaux ; ils exhalaient une vapeur savoureuse, et si épaisse que le dôme transparent de l’appartement en était obscurci. Un nombre égal de valets sont chargés de grands flacons de vin d’espèces différentes. Quelques-uns de ces vins moussent en sortant de leur prison et pétillent en-