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passer des étrangers sans goûter au moins de leur chair et de leur sang.

Eurylochus et ses compagnons pénétrèrent ensuite sous une arcade élevée, et plongèrent librement leurs regards dans l’intérieur du palais. La première chose qu’ils virent fut une salle spacieuse, et au milieu de cette salle un jet d’eau qui, d’un bassin de marbre, s’élançait vers la voûte pour retomber avec un murmure continuel. L’eau de cette fontaine, en jaillissant, prenait des formes qui se renouvelaient incessamment, et qui, sans être bien accusées, offraient à une imagination rêveuse des figures et des groupes parfaitement distincts. Tantôt c’était un homme portant une longue robe d’une éclatante blancheur ; tantôt un lion, un tigre, un loup, un âne, tantôt un porc qui se vautrait dans la vasque comme dans son étable. Cet effet extraordinaire devait se produire par une cause toute magique, ou par un mécanisme d’une combinaison merveilleuse. Les étrangers n’avaient pas eu le temps d’examiner de près ce phénomène, quand leur attention fut attirée par des sons doux et tendres. Une femme chantait dans une chambre voisine, et à cette voix se mêlait le bruit d’un métier auprès duquel elle était assise. Mariant le travail ingénieux de ses mains aux accents mélodieux les plus variés et les plus étendus, elle formait ainsi un riche tissu d’harmonie.