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À son retour vers le bord de la mer, Ulysse eut la chance de tuer un cerf énorme en le transperçant d’un javelot. Il chargea le corps de l’animal sur ses épaules (car Ulysse était un homme remarquablement fort) ; puis, arrivé au milieu de ses compagnons affamés, il le jeta à leurs pieds. Je vous ai déjà donné une idée de la gourmandise qui distinguait ces hommes. D’après les renseignements que j’ai pu recueillir, ils vivaient surtout de porc, et s’étaient tellement adonnés à ce genre de nourriture, que leur propre substance et leurs inclinations naturelles avaient subi une transformation en rapport avec la grossièreté de ces animaux. Un repas de venaison, cependant, n’était pas tant à dédaigner pour des estomacs qui avaient dû si longtemps se contenter de coquillages et d’huîtres. Après avoir examiné l’animal et palpé ses flancs en connaisseurs, ils ne perdirent pas un instant, et allumèrent un bon feu pour le faire cuire. Le reste de la journée se passa à festiner ; et, si ces mangeurs voraces se levèrent de table au coucher du soleil, ce fut seulement parce qu’ils ne trouvèrent plus rien à gratter sur les os de la pauvre bête.

Le lendemain, leur appétit se trouva aussi aiguisé que jamais. Ils regardaient leur chef d’un air qui signifiait : « Retournez donc au sommet de la falaise, et revenez avec un autre cerf bien gros sur vos