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Mais ses frères se trouvaient trop loin, et, d’ailleurs, la frayeur paralysait sa voix. Elle ne put se faire entendre. Elle s’arrêta, immobile, sa bouche gracieusement entr’ouverte, et les joues aussi pâles que les lis mêlés à ses guirlandes.

Néanmoins, ce fut plutôt l’apparition subite que l’aspect effrayant du taureau qui causa à Europe une si vive émotion. En le regardant plus attentivement, elle remarqua que c’était un très bel animal ; elle trouva même que sa tête avait une certaine expression de grâce et d’amabilité. Quant à son souffle (celui des bestiaux, vous savez, a toujours quelque chose d’agréable), il exhalait un parfum tel, qu’on pouvait supposer que ce taureau n’avait jamais brouté que des boutons de roses, ou tout au moins les fleurs de trèfle les plus délicates et les plus choisies. Jamais taureau n’avait eu des yeux aussi brillants et aussi tendres, des cornes d’ivoire aussi polies. Il commença à caracoler et à bondir avec gentillesse autour de l’enfant, qui, en le voyant folâtrer avec tant de souplesse et de légèreté, le considéra bientôt avec autant de sécurité que si c’eût été un innocent petit agneau.

Peu à peu elle s’habitua à ce qui lui avait d’abord causé de la frayeur. Elle en vint même à caresser, avec sa petite main blanche, le front du gracieux animal ; et, enlevant les guirlandes de fleurs qui ornaient sa propre tête, elle en entourait