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sur les rochers avec son cavalier. Enfin il exécuta plus de mille cabrioles, les plus extravagantes qu’aient jamais faites un cheval et un oiseau.

Il m’est impossible de vous décrire cette course effrénée au milieu des nues ; Pégase glissait dans l’espace, à droite, à gauche, en arrière. Il se tenait debout, les jambes de devant sur une couronne de vapeurs, celles de derrière sans aucun point d’appui. Il lançait des ruades terribles, et mettait ses naseaux entre ses pieds, en déployant ses ailes. À une lieue environ au-dessus de la terre, il se renversa en se cabrant, de manière que Bellérophon avait les talons où il devait avoir la tête, et voyait le ciel en bas au lieu de le voir en haut. Puis il se pencha de côté ; et, regardant l’audacieux en face, avec des yeux remplis d’éclairs, il tenta un suprême et vain effort pour le mordre, et agita ses ailes avec tant de violence et de fureur, qu’une de ses plumes d’argent s’arracha, et vint, tomber dans un champ où notre petit garçon la recueillit. Il la garda toute sa vie, en mémoire de Pégase et de Bellérophon.

Ce dernier, le meilleur écuyer qui eût jamais vécu, épiait le moment le plus opportun pour introduire le frein d’or dans la bouche du coursier. Il y réussit, et, à l’instant même, Pégase devint aussi soumis que s’il eût reçu toute sa vie sa nourriture de la main de son vainqueur. Je ne vous déguiserai