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que difficile dans sa nourriture, il y broutait quelques jeunes pousses de trèfle.

C’est ce qui explique comment les ancêtres des gens d’alors avaient conservé la croyance aux chevaux ailés. Aussi se rendaient-ils, pendant leurs belles années, à la fontaine de Pirène, dans l’espoir de jouir un instant de cette apparition magnifique. Dans la suite on ne l’avait que bien rarement aperçu. À l’époque dont nous parlons, non-seulement ceux qui habitaient les environs de la fontaine ne l’avaient jamais vu, mais la plupart ne croyaient pas même à son existence ; et le villageois auquel Bellérophon adressa la parole était du nombre de ces incrédules.

« Pégase ! s’écria-t-il en riant et en levant le nez aussi haut qu’un nez aussi camard que le sien ait jamais pu se lever. Ah ! Oui, vraiment ! Un cheval avec des ailes ! Avez-vous perdu la tête, l’ami ? À quoi donc serviraient des ailes à un cheval ? Croyez-vous que ça l’aiderait à tirer la charrue ? Il est vrai que pour le ferrage il y aurait économie, je ne dis pas non ; mais comme le charretier serait content de voir son cheval s’envoler par la fenêtre de l’écurie et galoper en l’air, quand il en a besoin pour aller au moulin ! Non, non, non ! Je ne crois pas à Pégase. Un animal aussi ridicule n’a jamais existé.

— J’ai des raisons pour croire le contraire, » répliqua Bellérophon tranquillement.