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CONTES ÉTRANGES

l’avertirent que quelqu’un travaillait dans le jardin. Bientôt un personnage apparut : c’était un homme de haute taille, au teint blême et maladif, revêtu de la robe noire des professeurs. Ses cheveux et sa barbe, déjà presque blancs, annonçaient qu’il avait dépassé le terme de la vie, et sa figure austère, plissée par l’habitude de la réflexion, semblait n’avoir jamais reflété les émotions d’un jeune cœur ardent.

Le savant jardinier considérait chaque plante avec une attention soutenue, comme s’il eût cherché à en pénétrer la nature intime et à découvrir les procédés employés par la nature dans la création de leurs différentes espèces. Il cherchait avec un soin méthodique les lois qui régissent la structure des feuilles, la coloration et le parfum des fleurs. Cependant, bien qu’il parût les connaître à fond, son commerce avec les plantes n’allait pas jusqu’à l’intimité. Bien plus, il semblait éviter le moindre contact avec elles, et son attitude était celle d’un homme se promenant au milieu d’objets dangereux ou soumis à quelque influence malfaisante. Cette défiance causa au jeune homme une désagréable impression.

Il lui semblait étrange qu’une occupation aussi innocente que l’inspection d’un parterre de fleurs, occupation qui passe à la campagne pour un des plaisirs les plus vifs qu’elle puisse procurer, pût être un sujet de plainte. Quel était cet homme qui tremblait devant les fleurs que sa main avait plantées ?

Pour arracher quelques feuilles flétries ou émonder des branches parasites d’une touffe de fleurs, le prudent vieillard avait eu le soin de revêtir ses mains de gants épais, et