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CONTES ÉTRANGES

et les deux bras étendus vers elle, comme s’il eût voulu l’embrasser tout entière ; ses yeux tournés vers la pierre semblaient s’enivrer de ses rayons, mais il était immobile comme une statue.

— C’est le Chercheur, dit tout bas Anna, serrant involontairement le bras de son mari ; Mathieu, je crois qu’il est mort.

— C’est la joie qui l’a tué, répondit le jeune homme en tremblant de tous ses membres peut-être que l’éclat de la grande escarboucle donne la mort à ceux qui l’approchent.

— La grande escarboucle, fit derrière eux une voix moqueuse, la grande blague, vous voulez dire ; eh bien, si vous l’avez trouvée, montrez-la moi.

Ils se retournèrent et virent l’homme aux prodigieuses lunettes regardant fixement le lac, la colline et la merveilleuse pierre elle-même, sans plus l’apercevoir que si la brume épaisse qui tout à l’heure les environnait s’était interposée entre elle et lui. Placé en face de l’évidence, il la niait de la meilleure foi du monde.

— Voyons, répéta-t-il, où est-elle votre grande blague ? Je vous défie de me la faire voir.

Probablement la couleur de ses lunettes remplissait pour lui l’office de ces verres noircis au moyen desquels on a coutume d’observer les éclipses de soleil, car, sur l’observation que lui en fit Mathieu, il les ôta brusquement et, fixant résolument la flamme incandescente de la grande escarboucle, il poussa tout à coup un douloureux gémissement et porta vivement les mains sur ses deux yeux, morts désormais à toute lumière. Depuis longtemps habitué à ne