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CONTES ÉTRANGES

ils se trouvaient, ils regardèrent à travers les interstices du feuillage pour voir leurs compagnons ; mais la cabane était déserte, et ceux-ci étaient sans doute partis depuis longtemps.

— Debout, mon cher Mathieu, cria la petite femme, ces étrangers sont déjà loin. Levons-nous vite, si nous ne voulons perdre la grande escarboucle.

En effet, les vapeurs du matin, combattues par l’influence bienfaisante du soleil, s’ébranlaient lentement et commençaient à fuir en longues traînées blanchâtres tout le long de la vallée. Les deux jeunes gens, après une toilette sommaire faite à la hâte dans les ondes limpides et fraîches du torrent, prirent un frugal repas assaisonné par la bonne humeur, et se levèrent simultanément pour se préparer à gravir la montagne, légers et dispos comme deux jeunes daims.

Doux emblème de l’amour conjugal, ils escaladaient péniblement les rochers en se prêtant un mutuel appui ; enfin, après quelques petits accidents qui signalent d’ordinaire ces sortes d’ascensions, tels qu’une robe déchirée, un soulier fendu, les longs cheveux d’Anna pris dans un buisson, ils atteignirent la dernière limite de la forêt, et dès lors leur montée devint plus pénible et plus périlleuse. Jusque-là leurs regards s’étaient arrêtés avec complaisance sur les arbres, dont le feuillage les récréait et dont l’ombre protectrice les garantissait de la trop grande clarté du jour ; aussi s’arrêtèrent-ils avec découragement en mesurant de l’œil cette vaste région qui leur restait à parcourir, hérissée de rochers entièrement nus, livrée au choc de tous les vents contraires et brûlée par les rayons ardents du soleil. Ils