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LA CATASTROPHE DE M. HIGGINBOTHAM

faut un endosseur à cette mystification, j’en veux trouver l’auteur ou l’éditeur responsable.

La nuit commençait à tomber lorsqu’il atteignit le bureau de perception de l’octroi de Kimbalton, situé à un quart de mille du village de ce nom.

Tout en recevant sa monnaie, Dominique échangea quelques mots avec le péager.

— Je suppose, dit le colporteur, caressant avec la mèche de son fouet la croupe de sa jument, que vous n’avez pas vu M. Higginbotham depuis un jour ou deux.

— Pardon, répondit le receveur, il vient de passer un moment avant que vous arriviez ; comme il est monté sur son cheval, peut-être pourrez-vous le distinguer dans l’ombre. Il a été cette après-midi à Woodfiels pour toucher un quartier de rente. Ordinairement le vieux gentleman ne passe jamais sans me donner une poignée de main ; mais ce soir il m’a fait un signe qui voulait dire : « Je vous devrai mon passage. » Puis il s’est éloigné tranquillement ; au train dont il marche, il ne sera pas rentré chez lui avant huit heures.

— L’heure de l’assassinat, pensa Dominique.

— Je n’ai jamais vu ce brave homme si triste et si pâle, continua l’homme de l’octroi ; ce soir il avait plutôt l’air d’un revenant ou d’une momie que d’un homme en bonne santé.

Le colporteur, en cherchant à pénétrer les ténèbres qui l’environnaient, distingua dans le lointain la forme d’un cavalier trottant sur un des bas côtés de la route ; il lui sembla que c’était le fantôme de M. Higginbotham, et il se sentit frissonner.