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LA CATASTROPHE DE M. HIGGINBOTHAM

que s’évanouir depuis qu’on avait trouvé son cher oncle pendu au poirier de Saint-Michel, avec ses poches retournées et tirant la langue d’un pied. Le poëte de l’endroit chanta les plaintes de la jeune dame dans une ballade qui n’avait pas moins de dix-sept strophes. Enfin les édiles tinrent un meeting où, en considération du dommage que ce funeste trépas causait au pays, on vota une récompense de cent dollars pour l’arrestation d’un des assassins et la découverte de l’argent volé.

Durant cette délibération, la population de Parker’sfall, composée de marchandes, de maîtresses d’hôtels, d’ouvrières de la filature, de fondeurs et d’écoliers, se rua dans la grande rue, où bientôt le bruit des conversations fut tel qu’il put compenser et au-delà le silence des machines. Si jamais défunt Higginbotham avait été soucieux de renommée, sa vieille âme devait tressaillir d’aise de tout ce tumulte.

Cependant, sortant de la réserve qu’il avait observée jusque-là, notre ami Dominique, mordu par le démon de la vanité, grimpa sur une fontaine publique et annonça à la foule qu’il était le propre messager de la nouvelle qui causait tant d’émotion. Aussitôt Dominique fut l’homme du moment : et il venait de recommencer son récit sur le ton larmoyant d’une prédication, lorsque la malle-poste entra au galop dans la grande rue. Elle avait roulé toute la nuit et avait dû relayer à Kimbalton vers trois heures du matin.

— Ah ! nous allons enfin avoir des détails, cria-t-on de toutes parts.

La voiture s’arrêta devant la porte de la taverne, suivi d’un immense concours de population ; car ceux qui jusque-