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CONTES ÉTRANGES

m’a appelé et m’a fait entrer chez lui pour me charger d’une petite commission. Il ne semblait pas se douter plus que moi qu’il avait été assassiné la veille.

— C’est impossible, dit Dominique, le meurtre serait donc controuvé ?

— Dame, il est au moins probable qu’il m’en aurait parlé, fit le fermier, qui retourna dans son coin, laissant le marchand de tabac muet de stupéfaction.

En effet, la déposition du fermier impliquait une véritable résurrection du vieux Higginbotham. Cette supposition coupa court au bavardage de notre ami qui, après s’être réconforté d’un grog au gin, alla gagner son lit où, durant la nuit entière, il rêva de pendus accrochés à des poiriers.

Pour éviter le caustique fermier — qu’il détestait si cordialement qu’il eût voulu le savoir pendu à la place de M. Higginbotham, — Dominique sortit au point du jour, attela la petite jument et partit au grand trot dans la direction de Parker’sfall. La fraîcheur de l’air, le sol chargé de rosée, les premières émanations du printemps l’eurent bientôt remis dans son assiette ordinaire, et il eût volontiers recommencé sa fameuse histoire s’il eût rencontré quelqu’un pour l’écouter. Par malheur il ne se trouva personne sur sa route, aucune voiture, aucun cavalier, pas même un malheureux piéton jusqu’au moment où, traversant la rivière du Saumon, il vit un homme qui marchait à sa rencontre, portant sur l’épaule un paquet attaché à son bâton.

— Bonjour, monsieur, fit le colporteur en arrêtant sa jument, si vous venez de Kimbalton, ou des environs, pourriez-vous me dire ce qu’il y a de vrai dans l’affaire de M. Hig-