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CONTES ÉTRANGES

ne dédaignent point la pipe, et le rusé marchand le savait mieux que tout autre. Il était en outre, comme nous le verrons plus loin, très-curieux et quelque peu bavard, avide d’apprendre des nouvelles pour avoir le plaisir de les répéter.

Après un modeste déjeuner pris à la hâte près de Morristown, notre marchand de tabac, qui répondait au nom de Dominique Pike, avait fait environ six milles à travers une forêt solitaire sans échanger une parole avec d’autres que sa petite jument grise. Sept heures allaient sonner et Dominique éprouvait un vif désir d’atteindre quelque buvette pour adresser la parole à un être capable de lui répondre. Une occasion favorable sembla justement se présenter, comme il venait d’allumer un cigare au foyer d’une lentille de cristal. En levant les yeux, il aperçut un voyageur qui atteignait le sommet de la colline au pied de laquelle il avait arrêté sa voiture. Dominique le regarda descendre et il observa que l’inconnu portait sur l’épaule un paquet suspendu à son bâton de voyage. Il paraissait fatigué, bien qu’il marchât d’un pas rapide, et semblait non-seulement avoir marché toute la nuit, mais devoir encore en faire autant tout le jour.

— Bonjour, monsieur, dit Dominique, quand l’autre put l’entendre ; savez-vous que vous marchez d’un bon pas. Quelles nouvelles à Parker’sfall ?

L’inconnu abaissa sur ses yeux la visière d’un grand chapeau de feutre et répondit d’un ton rogue qu’il ne venait pas de Parker’sfall.

Le colporteur n’avait cité cet endroit que parce qu’il comptait s’y reposer le même jour.