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CONTES ÉTRANGES

qui s’élevèrent à l’unisson dans un infernal crescendo, pour s’affaiblir insensiblement au point de se confondre avec le vent qui gémissait parmi les pins des trois collines.

En levant les yeux, l’étrangère rencontra ceux de la vieille femme.

— C’est vrai, se dit la dame comme parlant à elle-même, la joie cache la douleur.

— En veux-tu savoir davantage ? lui demanda la vieille.

— Il est une voix surtout que je voudrais encore entendre, répondit-elle.

— Alors place-toi sous ce manteau, car l’heure s’avance.

Le jour éclairait encore le sommet des collines, mais une ombre épaisse couvrait le vallon, s’élevant lentement, comme si c’eût été le séjour d’où les ténèbres allaient sur le monde.

La repoussante vieille recommença pour la troisième fois son incantation. Après un long et solennel silence, le tintement d’une cloche lointaine se fit entendre dans l’air ; bientôt il devint plus distinct et plus triste, c’était un glas funèbre qui semblait sortir de quelque vieille tour au manteau de lierre, portant au loin des nouvelles de mort, à la chaumière comme au château, au voyageur solitaire comme aux joyeuses assemblées, pour que chacun fît un retour sur la destinée qui l’attendait. Puis on entendit un pas lourd et cadencé, s’avançant avec la lenteur de ceux qui portent les cercueils d’enfants. Devant eux marchait le prêtre, récitant les prières d’un ton monotone, tandis que le vent agitait les feuillets de son livre, et, bien que seul, il parlait à haute voix ; on entendait des malédictions et des anathèmes prononcés par des voix d’hommes et de femmes, contre la fille