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LA MARQUE DE NAISSANCE

— J’ai beaucoup réfléchi sur ce sujet, interrompit le chimiste, et la réussite de cette expérience ne me semble pas douteuse.

— S’il y en a la moindre probabilité, répondit la jeune femme, essayez : quel que soit le risque à courir, le danger ne me saurait effrayer ; tant que cette marque me rendra pour vous un objet de répulsion, la vie ne pourra m’être qu’à charge, et je ne saurai la regretter. Enlevez-moi cette odieuse main, ou prenez ma vie. La nature n’a plus de secrets pour votre génie, et le monde est témoin des merveilles que vous avez accomplies. Comment ne pourriez-vous enlever une tache que mon ongle suffit à couvrir ? Est-ce donc une entreprise au-dessus de vos forces, et votre science est-elle impuissante à vous donner le calme et à rendre la raison à votre malheureuse femme ?

— Noble et chère créature, s’écria Aylimer à la fois ému et ravi, ne doutez plus de mon pouvoir. Sachez donc que j’ai fait dans ce but d’immenses recherches et pénétré les arcanes de la science. Je suis certain de rendre cette pauvre joue immaculée comme sa sœur, et plus adorable mille fois, puisque c’est par elle que j’aurai triomphé de la nature dans son œuvre la plus parfaite. Pygmalion, au premier soupir de Galatée, n’a pu ressentir un bonheur égal à celui qui m’est réservé.

— Ainsi, voilà qui est résolu, dit Georgina, souriant doucement ; ne m’épargnez pas, Aylimer, dût cette marque se réfugier jusqu’à mon cœur.

Son mari la remercia par un baiser.

Le lendemain, Aylimer instruisit sa femme de la marche qu’il voulait suivre, sans rien lui cacher des expériences