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puté. Cette mort ne s’offre pas à nous avec les mêmes caractères qu’elle eut pour nos devanciers. À un siècle et demi de distance, on ne voit pas les choses du même œil, et nous n’éprouvons à aucun degré l’horreur flétrissante qui s’attacha naguère à l’humble nom de l’infortuné cottager, — qui fit regarder comme un acte religieux de passer la charrue sur le sol de son habitation — et voua sa mémoire à un prompt oubli.

Le vieux Matthew Maule, pour tout dire en un mot, fut exécuté comme « sorcier, » et son martyre, entre autres vérités morales, met en lumière la responsabilité des classes influentes, sujettes par malheur aux mêmes passions que la plus folle multitude. Prêtres, magistrats, hommes d’État, — les plus sages, les plus pacifiques, les plus saints personnages de leur temps — vinrent faire cercle autour de la potence, et, après avoir applaudi plus haut que tous l’œuvre de sang, furent les derniers de tous à confesser l’effroyable illusion dont ils avaient été dupes. Quand ils en furent là, lorsque fut apaisée la frénésie de cette hideuse époque où la persécution avait sévi indifféremment sur toutes les classes, où le supplice de Maule n’avait été qu’un épisode tragique perdu dans la foule de semblables événements, on se souvint que le colonel Pyncheon avait mis un acharnement singulier dans ses anathèmes contre « la sorcellerie, » dans ses réclamations pour qu’on en purgeât le pays ; on se rappela tout bas le zèle qu’il avait mis à faire condamner Matthew Maule, zèle un peu suspect, il faut bien le dire, et dont la victime elle-même semblait avoir deviné les motifs secrets. Au moment de l’exécution, — la corde autour du cou et tandis que le colonel Pyncheon, du haut