Page:Hawthorne, La maison aux sept pignons, Hachette, 1886.djvu/25

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

elle était injustement privée… Aux yeux d’un antiquaire, un siècle et demi ne constitue pas un laps de temps si long qu’il puisse amener la prescription du droit, et d’un bien volé faire une propriété légitime. Ses plus intimes connaissances ont toujours cru que ce bizarre personnage aurait restitué à l’héritier de Matthew Maule la fameuse Maison aux Sept Pignons, sans l’espèce de tumultueuse révolte que ce projet, soupçonné par eux, suscita parmi les Pyncheon. Leurs efforts aboutirent à lui faire ajourner sa résolution ; mais on craignait qu’il n’accomplît, une fois mort, au moyen de son testament, ce qu’on l’avait empêché de faire pendant sa vie. Peut-être ne se fiait-on pas assez à la puissance de ces liens de famille qui enchaînent surtout les volontés de l’homme prêt à mourir, et lui font, dans la distribution de ses richesses, préférer ses proches les plus indifférents à ses amis les plus chers. Chez tous les Pyncheon, ce sentiment avait une intensité maladive : il domina les consciencieux scrupules du vieux célibataire. — Après sa mort, en conséquence, l’hôtel de famille ainsi que la plus grande partie du reste de sa fortune, passa dans les mains de son héritier légal.

Celui-ci était un neveu, et le cousin du malheureux jeune homme reconnu coupable du meurtre de son oncle. Le nouvel héritier, jusqu’à l’époque où cette fortune lui échut, avait généralement passé pour un dissipateur ; mais il se corrigea tout aussitôt, et regagnant rapidement ses titres à l’estime publique, prit dans le monde une position plus éminente que n’en avait occupé aucun des Pyncheon, depuis la mort de l’ancêtre puritain auquel leur nom devait son principal éclat. Appliqué de bonne heure à l’étude des lois, et doué de