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drait-il pas se servir d’une expression directement opposée ?

Ainsi que nous l’avons déjà laissé entendre, nous ne nous proposons nullement de raconter l’histoire de la famille Pyncheon dans ses rapports interrompus avec la Maison aux Sept Pignons. Il nous faudrait pour cela un grand miroir, d’aspect assez terne, suspendu dans l’une des chambres, et qu’on disait renfermer dans ses profondeurs toutes les ombres qu’il avait tour à tour réfléchies, — le vieux colonel lui-même et ses nombreux descendants, — les uns à l’état de marmots séculaires, les autres dans tout l’éclat de la beauté féminine ou virile, et ceux d’entre eux qui vécurent longtemps, couverts des rides que la froide vieillesse imprime sur les fronts blanchis. On disait de ce miroir mystérieux, — et sur quel fondement, nous ne le savons, — que la postérité de Matthew Maule avait avec lui des rapports pour ainsi dire mesmériques, et pouvait y faire apparaître les Pyncheon défunts, non tels qu’ils s’étaient montrés au monde, ni aux époques où ils avaient été bons et heureux, mais occupés à quelque œuvre mauvaise ou subissant la crise de quelque amer chagrin. On voit que l’imagination populaire s’était emparée pour longtemps de cet épisode dramatique où le vieux puritain Pyncheon et le sorcier Maule avaient joué les rôles principaux ; on voit que le souvenir vivait, de cet anathème que le dernier avait jeté du haut de l’échafaud, et qu’on en avait fait, circonstance importante, une portion de l’héritage Pyncheon. Si quelqu’un de la famille, éprouvant un léger embarras du gosier, venait à éclaircir sa voix par une toux volontaire, il arrivait souvent qu’on